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Listes de joueurs pour les compétitions UEFA et compatibilité avec le droit de l'UE :
vers un changement de règles ?

Publié le
Par Hadrien Flamant

Droit du sportFootballRéglementation FIFA

Représentant parfois un casse-tête pour les staffs et team managers de clubs européens en début de saison : l'établissement de la liste de joueurs éligibles pour disputer les compétitions UEFA pourrait bientôt connaître un changement de règles…

Cette règle édictée par l'UEFA prévoit dans les grandes lignes que les clubs disputant les compétitions européennes doivent inscrire au minimum 8 joueurs « formés localement » sur une liste de 25 joueurs maximum. Les joueurs formés localement sont définis comme des joueurs qui, indépendamment de leur nationalité, ont été formés par leur club ou par un autre club de la même ligue nationale, pendant au moins 3 ans entre l'âge de 15 ans et 21 ans. Enfin, parmi ces 8 joueurs, au moins 4 doivent avoir été formés par le club en question.

UEFA flags

Cette règle édictée par l'UEFA (et reprise par certaines fédérations nationales) a fait l'objet d'une contestation de la part d'un joueur et d'un club estimant qu'elle restreignait la possibilité pour un club de football professionnel de recruter des joueurs qui ne remplissent pas la condition de l'origine locale ou nationale, et de les aligner dans un match. La problématique a logiquement abouti à deux questions préjudicielles posées à la Cour de Justice de l'Union Européenne. En effet, il est désormais clair et intégré que les activités sportives professionnelles relèvent de la vie économique et du champ d'application des libertés fondamentales garanties par le Traité sur le Fonctionnement de l'UE.

Dans ses conclusions publiées le 9 mars dernier, l'avocat général Maciej Szpunar a estimé que ces règles relatives aux joueurs formés localement sont partiellement incompatibles avec le droit de l'UE, notamment en matière de libre circulation.

Selon lui, ces règles sont « susceptibles de créer une discrimination indirecte à l'encontre des ressortissants d'autres États membres ». Ainsi, plus le joueur est jeune, plus il est probable que ce joueur réside dans son lieu d'origine ; en conséquence, ce sont nécessairement les joueurs d'autres États membres qui seront affectés négativement par ces règles UEFA. Dès lors, les joueurs locaux sont assurément avantagés par rapport à ceux issus d'autres pays.

L'avocat général, faisant référence notamment à l'arrêt Bosman aux termes duquel le sport (et le football en particulier) revêt une importance sociale considérable au sein de l'UE, impliquant alors la reconnaissance de la légitimité de l'objectif consistant à encourager le recrutement et la formation des jeunes joueurs, indique que ces restrictions prévues par l'UEFA pourraient être justifiées, puisqu'aptes à atteindre un objectif de formation et de recrutement de jeunes joueurs.

Mais, dans le cadre de cette réglementation UEFA concernant les joueurs formés localement, il éprouve « certains doutes quant à la cohérence générale des dispositions litigieuses, en ce qui concerne la définition d'un joueur formé localement ». En effet, il met en doute la pertinence d'étendre la notion de « joueur formé localement » à un joueur formé par un autre club de la ligue nationale, permettant ainsi à un joueur extérieur au club, mais ayant été formé par un club de la même ligue nationale, d'entrer dans la définition de joueur formé localement.

Ainsi, l'avocat général conclut que « les dispositions litigieuses ne sont pas cohérentes et ne sont donc pas aptes à atteindre l'objectif de formation des jeunes joueurs : les joueurs formés localement ne devraient pas inclure des joueurs provenant d'autres clubs que le club concerné ».


En somme, bien que les conclusions de l'avocat général ne lient pas la Cour de justice, il convient d'attendre la solution de la Cour dans cette affaire, qui pourra impliquer à l'avenir des modifications réglementaires, auxquelles les clubs susceptibles de disputer une compétition européenne devront être des plus attentifs.